Réflexions sur le dossier du logement à Gatineau

Le dossier du logement en est un complexe. Les trois paliers gouvernementaux ont chacun leur rôle à jouer qui détermine leur capacité d’intervention en la matière.

Il est primordial que la ville de Gatineau augmente le nombre de logements abordables et sociaux construits sur son territoire, mais d’après moi, elle fait fausse route en se donnant des objectifs en termes de nombre de logements construits. Je pense en effet qu’il serait plus réaliste et plus intéressant de se fixer des objectifs en pourcentage.

Pour répondre à la demande annuelle en matière de logement social ou abordable, 10% des constructions du parc de logement devraient être consacré à ce type de logements.  Donc, nous pourrions voir entre 150 à 220 logements dédiés aux personnes en situations financières précaires (moyenne de 1500 – 2000 nouveaux logements/an).  Remarquez, ceci ne règle aucunement la liste d’attente actuelle ou les déménagements en provenance de l’Ontario qui sont impossibles à prévoir et qui sont difficilement calculables.  

Il ne revient pas à la ville seule de financer ses logements.  La responsabilité est partagée entre les trois paliers de gouvernement.   Le fédéral investit dans le logement, mais souvent d’une façon restrictive et limité (par le biais de programmes spécifiques).  Le provincial, à mon avis, se doit de transférer les sommes intégrales de ces montants pour assurer qu’un maximum de logements puisse être construit.  Le provincial offre lui aussi des montants appelés unités de logement.  Le montant  qu’il remet par unités aux OSBL est considérable.  La ville pour sa part investit 15% du montant offert par le provincial, soit 2,6 M$ pour 160 unités, ou un peu plus de 16 000$ par logement.

Favoriser la mixité

Comment créer une mixité de logement social et créer un parc de logement locatif dit abordable? Voilà la question à laquelle les villes doivent répondre pour offrir une solution gagnante à la fois pour les citoyens et les gouvernements.

Retournons en arrière de quelques années… Il y a quelques années, le gouvernement provincial subventionnait la construction de logement abordable par des entrepreneurs privés.  Cette formule a connu un grand succès à Gatineau.  Comment cela fonctionne-t-il?  En gros, le gouvernement offre des unités de logement tout comme avec les OSBL, mais cette fois pour des logements abordables locatifs, construits et situés dans les constructions privées.  L’entrepreneur, en échange d’une subvention, s’engage à offrir ces unités à un prix sous la valeur du marché pendant une période minimale de 10 ans.  Nous voici avec un autre type de logement, dont le prix de location se situe au-dessus des logements sociaux, mais sous le prix « réel » du marché. Mais pourquoi le gouvernement verrait-il d’un bon œil cette approche? Financièrement, ça a bien du bon sens!  Vous vous souvenez du 2,6M $ pour 160 unités? Le volet privé demande à la ville et au provincial un investissement moindre.  Sous ce programme nous pouvons construire 4 fois plus de logements pour le même investissement.  La solution n’est pas de mettre tous nos œufs dans le même panier mais bien de créer une mixité. 

Pour bien répondre à la demande initiale de 150 à 220 unités, nous prendrons la moyenne de 185 logements par année pour cet exercice.  Nous devons faire le comparable entre un financement d’unités sociales seulement, ou un partage d’unités sociales et privées pour voir le bien-fondé d’une mixité.

Les comparables : 

Unités (OSBL)
Unités (privé)
Mixité d’unités
185 unités à 108 000 $/unité
185 unités à 20 000 $/unité
140 unités « sociales » = 15M $
+ 50 unités privées = 900 000$
Investissement provincial :
20M $
Investissement provincial :
370 000 $
Investissement provincial :
15,9M $

J’avoue que ce calcul est simpliste et qu’en réalité, le partage risque d’être beaucoup plus complexe!  Mais l’objectif est de vous démontrer l’opportunité que ce programme apporte à une région comme la nôtre.  J’ai déjà rencontré le directeur et les membres de l’APCHQ pour connaître leur réaction face à ce modèle de partenariat;  ils sont prêts à embarquer!  Pour ce qui est de l’ouverture du nouveau gouvernement provincial… ça reste à voir.  Si je me fie à l’accueil que j’ai reçu de l’attaché politique du ministre Gaudreault et de l’adjoint parlementaire au dossier, le député de Berthier André Villeneuve, Gatineau passera toujours après Montréal, Québec et leurs banlieues.

Les taudis : une responsabilité partagée

Dans un tout autre ordre d’idée, mais toujours relié au logement, le cas des logements insalubres, les taudis, est un cas grave auquel il faut s’attaquer. Le parc de logements au Québec est vieillissant et malheureusement, Gatineau ne fait pas exception.  Les constructions datent de plusieurs décennies et nécessitent pour la plupart de gros investissements. Le programme de rénovation est adéquat pour les petits immeubles, mais ne règle aucunement la problématique dans son ensemble.  La CORPIQ revendique la limitation des augmentations des loyers et l’incapacité financière que ceci apporte aux propriétaires en matière d’entretien des immeubles.  La ville de Saguenay a récemment appuyé la CORPIQ dans ses revendications auprès du gouvernement provincial de revoir cette loi pour leur permettre la mise à jour de leurs édifices locatifs. À mon avis, l’UMQ et Gatineau tardent à régler cette problématique grandissante et nous en sommes tous affecté négativement.  Les nouvelles constructions vertes qui encouragent la construction d’édifices de plus de 4 étages en bois, réduit le coût à la construction, mais apportera sûrement ses problématiques à long terme si les prix des loyers ne suffisent pas à un entretien régulier.

On est très prompts à accuser les propriétaires fautifs, mais parfois, les logements sont transformés en taudis par les locataires eux-mêmes. Personne n’ose aborder ce sujet parce que personne ne veut avoir l’air insensible face au problème. Certains organismes misent sur ce silence pour dénoncer des taudis qui le sont devenus, non pas à cause de l’inaction des propriétaires, mais par le mode de vie des locataires. Il est extrêmement difficile pour une ville, un politicien ou un organisme de sortir publiquement dénoncer les habitudes de vies malsaines, malpropres et inappropriées de certains locataires fautifs. Mais pourtant, ces cas sont régulièrement médiatisés, ce qui augmente la désinformation à un certain niveau et masque les vrais enjeux de notre société et ses lacunes. Le propriétaire se retrouve souvent devant un fait accompli où le logement nécessite de grandes réparations et rénovations après le passage d’un locataire au mode de vie discutable. À l’inverse, les locataires qui vivent réellement dans des taudis se retrouvent trop souvent sans soutien et sans logement. Dans notre ville, les organismes communautaires soutiennent ce fardeau. Trop souvent, seuls.

La ville de Gatineau utilise pour la première fois son code d’insalubrité et applique son article à plein régime.  Le temps de rodage est un peu long j’en conviens, mais l’effort et l’énergie qui sont déployés sont significatifs.  De nouveaux inspecteurs, de la formation, une harmonisation des services, une plus grande concordance dans nos mesures d’intervention avec la réglementation en place et un suivi.  J’ai aussi fait la demande d’instaurer des mesures d’évaluation de rendement et contrôle de la qualité du Service.  Merci aux services d’urbanisme, urbanisme volet habitation, juridique, CANU, SARLS, centre de service et le cabinet du maire.

Une autre forme d’habitation

Nous avons un fonds pour l’achat de terrains et certaines soumissions pour l’achat de terrains ont été faites dans les dernières années.  Il est possible de faire l’investissement d’achat de terrain pour mettre sur pied des coopératives.  Il serait important de voir avant comment le mouvement d’acquisition de propriété à l’intérieure des coopératives se déroule.  La nouvelle tendance européenne, controversée, semble vouloir s’établir au Québec. L’accession à la propriété est un enjeu important dans la mixité des logements et dans la liste des besoins pour les familles à moyen faible revenus.  Mais comment les villes de demain joueront-elles un rôle dans ce processus et à qu’elle niveau devons-nous investir pour ce modèle?  Le mode actuel fonctionne bien, mais il faut se souvenir que l’objectif des coopératives était à la base de loger les gens à revenu modeste.  Est-ce toujours le cas? Lors d’une entrevue avec Roch Cholette au 104,7 FM, nous avons appris qu’une collaboratrice à son émission habitait une coopérative d’habitation… Comment exercer un contrôle?

Le fonds d’acquisition de terrains nous sera très utile lors de la revitalisation intégrée du Vieux-Gatineau et de la densification et la revitalisation ciblées dans le schéma d’aménagement. La ville aura intérêt à maintenir ses réserves pour faire l’acquisition temporaire des milieux déjà construits pour éliminer la spéculation sur les terrains.  Sans cette mise de fonds, la revitalisation sera très onéreuse pour les entrepreneurs privés et affectera le prix locatif à la hausse dans les corridors du transport en commun et les milieux desservis par les services de proximité.  Le fait même d’acquérir ces propriétés permet à la ville d’y imposer un pourcentage de logement abordable avec le volet privé, tel que mentionné au début de ce texte. Présentement, la ville n’a pas le droit d’imposer du logement abordable sur un terrain qui ne lui appartient pas.  Certaines villes procèdent par entente ou par intimidation, mais il n’en demeure pas moins que le propriétaire du terrain a le gros bout du bâton.


Le forum sur la situation de l’habitation et du logement abordable en Outaouais

Je trouve l’exercice du Forum intéressant et je crois que plusieurs solutions y seront apportées. Mon désir le plus fort est que le gouvernement du Québec ait une écoute attentive à nos besoins et qu’un jour, ma ville ait un statut particulier en matière de logement, de tourisme, de santé, d’éducation et de transport.  Le fait que nous devions encore débattre et expliquer au gouvernement notre situation particulière en raison de notre contexte frontalier m’indique que nous ne sommes pas sortis du bois!

Je demeure une alliée pour le prochain mandat avec des actions concrètes et non des promesses. Je siège au comité permanent de l’économie sociale à la Fédération canadienne des municipalités (FCM) et notre priorité est l’abordabilité des logements, le logement social et les problèmes d’itinérance.   Le président de la FCM a fait part des priorités des municipalités à M. Harper par le biais d’une lettre avant le discours du trône (voir ici : http://bit.ly/1brv7gi). Le premier ministre dans son discours a soulevé le point et assuré que le gouvernement serait partenaire dans nos initiatives.  Le prochaine rencontre de la FCM, au mois de novembre, se passera à Ottawa pour faire nos revendications auprès des députés fédéraux.  Si je suis réélue, j’y serai, comme l’an passé pour le budget des infrastructures.

Je continue mes rencontres avec les organismes communautaires pour comprendre leur réalité et appuyer leurs démarches.

Je ne manque aucune occasion de sensibiliser nos élus provinciaux à nos besoins et réalités.  C’est toujours un plaisir pour moi de rencontrer les acteurs impliqués et de discuter avec eux de nos problèmes, mais aussi des opportunités à saisir et des solutions à apporter.

Sylvie


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